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Mail ouvert à Madame Delphine BATHO

Mibistre de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie.

 


Ville-sur-Terre

11 septembre 2012




Objet : l’enfouissement des déchets radioactifs à BURE (Meuse)

et à SOULAINES (Aube)


Madame,

Votre parcours dévoile tout l’intérêt que vous portez aux problèmes de sécurité des citoyens.
Et aujourd’hui, après la Justice, votre quotidien baigne dans l’Ecologie.

Je ne connais pas les caractéristiques de votre licol ni celles de votre muselière,
je ne connais pas vos rapports avec Arnaud Montebourg qui vient de déclarer que « le nucléaire est une filière d’avenir », mais en matière de nucléaire, vous semblez pouvoir vous exprimer clairement : "Il n'a jamais été question ni de sortir ni d'abandonner le nucléaire", mais de réduire sa part dans la production d'électricité de 75 à 50 % d'ici à 2025.

En matière de démantèlement des installations nucléaires, vous avez précisé : il y a "une filière industrielle que nous devons développer".

A l’université d’été du MEDEF vous avez osé : «la France a durablement besoin du nucléaire»

Enfin vous venez de réaffirmer la volonté du gouvernement de fermer la centrale nucléaire de Fessenheim , selon un calendrier qui sera discuté lors du débat sur la transition énergétique.

Et justement, Madame la Ministre, j’aimerais vous interpeller, voir vous éclairer, sur la gestion des déchets nucléaires, sur ce sujet polémique qu’est le choix de l’enfouissement des déchets nucléaires.
Sujet qui mériterait débat.

C’est en effet votre gouvernement qui signera papiers et décrets pour la construction de CIGéo à BURE, (enfouissement à 500 m des déchets HA et MA-VL, et qui décidera de la création d’un stockage également en couche profonde (entre 15 et 200 m semble t-il), à SOULAINES pour les déchets FA-VL.

Je voudrais donc Madame la Ministre vous rappeler les grandes lignes et les grandes inquiétudes qui caractérisent le projet CIGéo.

1 – Le consensus international sur le choix de l’enfouissement.
Ce consensus est contestable. Il est basé sur une succession de réunions, colloques, forum, symposium… dont les conclusions sont devenues des recommandations - des communiqués – puis, via les auditions de l’OPECST, des lois françaises - puis des directives européennes !

2 – Mais ce consensus est assujetti à la FAISABILITE du projet et à la CONFIANCE que l’on peut lui accorder.

Prescriptions de sûreté particulières
No SSR-5


3.28. Il est nécessaire de comprendre les caractéristiques de l’installation de stockage définitif et la manière dont elle fonctionnera dans le temps pour pouvoir démontrer la fiabilité de certaines caractéristiques de conception. Cette démonstration est plus facile si ces caractéristiques de conception sont robustes (c’est-à-dire peu sensibles à d’éventuels événements ou phénomènes perturbateurs). Il faut obtenir des preuves suffisantes de leur faisabilité et de leur efficacité avant que les activités de construction ne commencent.

4.2. L’expression « approche par étapes » de la réalisation d’une installation de stockage définitif de déchets radioactifs renvoie aux étapes qui sont imposées par l’organisme de réglementation et par les processus décisionnels politiques (voir par. 1.18). Cette approche donne l’occasion de garantir la qualité du programme technique et de la prise de décisions qui y est associée. Pour l’exploitant, elle fournit un cadre permettant d’instaurer une confiance suffisante dans la faisabilité technique et la sûreté de l’installation de stockage définitif à chaque étape de sa réalisation.

3 – Or, au vu des récentes analyses de l’expert indépendant Bertrand THUILLIER, il est clair que la faisabilité est remise en cause, et la confiance impossible.


Volet 1 - Volet 2 - Volet 3

4 – Sans entrer dans le détail, le Docteur es Sciences Bertrand THUILLIER vient de mettre en lumière bon nombre de problèmes à court terme, qui font de CIGéo un projet aussi FLOU que FOU !

- FLOU dans le dimensionnement de l’entreposage. S’agit-il d’un entreposage tampon ou d’un entreposage relais des actuels entreposages sur site, qui deviendraient trop petits, vieillissants ou défaillants ?

- FLOU dans la qualité des colis : contamination surfacique hors norme, colis abimé…

- FLOU dans le contenu des colis : le dernier inventaire a montré qu’on ne connaît pas le contenu de 40 000 d’entre eux. Sans oublier la destination future du MOX et des combustibles usés…

- FLOU dans la technique de creusement des galeries et alvéoles : problèmes de tunneliers…

- FLOU dans la technique des machines de transferts automatiques de la double descenderie…

- FLOU dans la technique de scellement des alvéoles. Aujourd’hui l’ANDRA ne sait pas réaliser un scellement. Elle n’en est qu’au stade de l’expérimentation.

- FLOU dans la signification de la réversibilité, qui évolue au fil du temps, et que l’ASN pourrait même interdire, parce que cette réversibilité est difficilement compatible avec la sûreté…

- FLOU dans la conception globale de l’entreposage… Une véritable usine à gaz…radioactifs !

- FLOU dans le calendrier : pourquoi cette précipitation ? Alors que les colis, eux, ne demandent qu’à refroidir en surface avant d’être enfouis…


Voilà pour le FLOU !

Pour le FOU :

- FOU de savoir que l'acheminement par voie ferrée est le premier défi : pas moins de 10 000 trains de 10 wagons, type CASTOR, vont arriver à BURE !
Si on les aligne à raison de 10 wagons par ligne , cela représente un livre de 400 pages au format A4.

- FOU d’enfouir dans des alvéoles fermées des colis qui « crachent » de l’hydrogène. Pendant 100 ans, d’énormes ventilations (doublées) rejetteront en surface des gaz radioactifs et de l’hydrogène, avec un risque avéré d’explosion et d’incendie. Or, l’ANDRA annonce une production par radiolyse d’un million de litres d’hydrogène par an. Un tel volume interdit tout arrêt pendant plus de 6 jours de l’énorme ventilation envisagée (500 m3 par seconde) ; et ceci doit tenir un siècle !
Quel expert peut le garantir ? Cela ressemble bigrement aux problèmes actuelles des centrales nucléaires : il ne faut pas de pannes d'électricité et pas de groupes électrogènes de secours défaillants...

De plus, parmi ces déchets, on dénombre 10 000 tonnes d’enrobés bitumineux auto-inflammables à 350°C. Quels pompiers iraient éteindre un incendie de bitume radioactif, à 500 m sous terre et sans utiliser d'eau (parce que l'eau est l'ennemie du stockage) ?

Les conséquences d’un incendie seraient catastrophiques : fragilisation des structures en béton, suppression du confinement des radioéléments, contamination des galeries d’accès... Fermeture immédiate du site...Voire remontée immédiate des colis...

- FOU d’imaginer qu’une double ventilation supprimera le risque. Et tous ces gaz radioactifs qui vont aller directement dans les poumons des riverains.

- FOU d’imaginer remonter les colis, en cas de problème (incendie, accident de criticité, inondation), à la même vitesse que celle de la descente. Au pire : si on a mis un siècle pour les enfouir, il faut un siècle pour les remonter.
Dans quel état seront-ils ? Où les stocker en surface ? Et qui paiera la facture ?

- FOU d’oublier le risque de criticité. Et en plus l’eau aggrave ce risque.

Et n'oublions pas tous les risques pour le personnel qui travaillera durant un siècle...

L’ANDRA a étudié, mais séparément, tous ces risques et pour chacun d’eux a trouvé soi disant une "parade". La difficulté vient de leurs combinaisons éventuelles. Peut-on réellement calculer tous ces risques ? Peut-on faire confiance en des modèles mathématiques imaginés par des étudiants de grandes écoles partenaires de l'Andra ?  Si un accident se produisait, les dommages pour les populations et l’environnement seraient considérables.  En cas d'incendie on se retrouverait dans une configuration voisine de celle de Tchernobyl. En cas d'explosion, on se retrouverait à Fukushima.

- FOU d’attendre les réponses à toutes les questions qu’on se pose sur tout ce qui pourrait arriver durant le siècle d’exploitation.

- FOU de savoir que l’ANDRA parie ensuite sur la Nature pour confiner cette incroyable concentration de radioactivité. Sûr : il n’y aura aucun séisme, aucun mouvement de terrain, aucune faille, aucune infiltration d’eau. Rien ne remontera à la surface durant l’éternité !

- FOU d’arriver à un coût total toujours aussi FLOU, de 15 à 30 milliards d’euros selon la CNE.
Voire 45 milliards. Et cette estimation ne prend pas en compte une éventuelle récupération des colis.
Finalement, CIGéo, c’est une dépense d’un million d’euros par jour pendant un siècle !

5 – Nous n’aborderons pas les problèmes d’éthique, d’achat des consciences, de promesses faites aux élus et aux riverains, méthodes proches de celles de la prostitution et de la corruption, pour faire aboutir un projet qui relève du crime contre l’humanité.

6 – Vous n’ignorez pas que l’ASN, Autorité de Sûreté Nucléaire, l’IRSN, Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, le GPD, Groupe Permanent d’experts pour les Déchets, la CNE, Commission Nationale d’Evaluation des travaux de l’ANDRA, sont les évaluateurs officiels du projet.

A lire les communiqués de l’ANDRA on pourrait croire que le projet CIGéo est un chantier modèle et que tout baigne, puisque l’ANDRA parle de SATISFECIT GENERAL.
Lire par exemple les pages 1et 2 de ce journal .


7 - En fait il n’en est rien :

Le 13 mars dernier, lors de la présentation de son 5ème rapport, la CNE a répété maintes fois que le projet CIGéo était flou, et a bien confirmé que quantités de problèmes techniques n’étaient pas résolus. Voir le résumé vidéo .


8 - Si l’on étudie les derniers Avis officiels de l’IRSN, du GPD et de l’ASN on constate que ces évaluateurs admettent seulement « que la démarche de sûreté adoptée par l’ANDRA est satisfaisante », mais ils émettent bon nombre de réserves, celles justement soulevées par Bertrand THUILLIER : options d’entreposage - concomitance des activités de construction et d’exploitation – problèmes de descenderie – augmentation des longueurs des alvéoles - risques de perte de confinement – défaillance des colis - risques de contamination des locaux - risques d’incendie - risques d’explosion - risques liés au transfert et à la manutention des colis – faisabilité des scellements - endommagement de la roche du au creusement – modélisation des écoulements souterrains – sûreté, criticité et réversibilité – expérimentation et calendrier – budget et financement…

9 - Le projet CIGéo n’étant absolument pas prêt aujourd’hui, l’IRSN se contente « d’une approche progressive, qui serait alors raisonnable, dans la mesure où la réalisation des différentes parties du stockage pourrait faire l’objet de demandes d’autorisation spécifiques étalées dans le temps ! »
Et c’est probablement la stratégie qui va être adoptée : dans l’impossibilité aujourd’hui de valider les plans de la construction, ni les matériaux, ni le mode opératoire, ni les entreprises spécialisées, ni le budget, ni le financement, votre Gouvernement, Madame la Ministre, va quand même donner l’autorisation de construire une USINE A GAZ RADIOACTIFS… et qui devrait « tenir »pendant un million d’années… et les Gouvernements sucessifs valideraient les étapes au fur et à mesure !
En clair, c’est signer un chèque en blanc…
Cette démarche est inacceptable.

10La réversibilité : L’ASN insiste sur le problème de la réversibilité qui va à l’encontre de la sûreté. Lors d’une récente réunion dans le cadre de l’ANCCLI, l’ASN a d’ailleurs clairement laisser entendre que la dimension sociétale qu’est la réversibilité pourrait bien disparaître.

11 – Nous émettons par ailleurs des réserves quant à l’indépendance des Avis de l’IRSN, du GPD et de l’ASN.
Il s’agit en fait de superbes copiés-collés.

Enfin, il y a interaction évidente entre les membres de ces entités. Notez que le président du GPD, est Pierre BEREST, lui même membre de la CNE !!!

Madame la Ministre, si on ne peut pas mettre l’ASN, l’IRSN, le GPD, la CNE, le HCTISN et l’OPECST dans le même panier, on est en droit de se poser des questions sur le processus décisionnel concernant le projet CIGéo...

Je me suis permis de qualifier ces évaluateurs de "voyous", comme il éxiste des états et des patrons "voyous"… Je pense que c'est justifié, et cet état de fait n'est pas l'exclusivité de la France !

En Suisse, c'est pas mal non plus ! Marcos BUSER y dénonce le copinage dans le nucléaire Suisse.

Et en Belgique ? Le responsable de l'équivalent de l'ANDRA locale touche des pots de vin ...

 


12 – Non, CIGéo n’est pas qu’une opportunité de développement de la région, et sources de richesses. Voir par exemple ce publi-reportage paru le 17 janvier dans le Journal de la Haute Marne, sous forme de lettre ouverte.

C’est ce que déclarent régulièrement les média locaux, comme L’Est-Républicain et le Journal de la Haute-Marne.
On sent la pression de l’ANDRA et de l’EDF (annonceurs), on sent aussi la pression des élus (députés et conseillers généraux).

13 – On ne peut croire non plus les journaux nationaux, qui ventent bien souvent la solution trouvée, et tous les avantages économiques. Ils sont rédigés de telle façon que le lecteur soit bien convaincu que le projet est déjà ficelé et sur des rails. Effectivement les riverains pensent que « CIGéo, c’est fait ! »
Exemple parmi les plus récents, lu dans
Boursier.com :

En 2025, les déchets nucléaires rejoindront enfin leur tombeau

Les journalistes écrivent : " Le laboratoire est ultra moderne. Il accueillera enfin…
La France est pionnière en la matière. Depuis 20 ans la colère des opposants bute.  L'Andra, qui a déjà dépensé un milliard d'euros dans ce projet, doit trouver une solution pour les stocker durablement en garantissant la sécurité des générations futures."

A lors que rien n’est fait, parce que rien n’est faisable.

14 – Curieusement, après des mois de « harcèlement », à force de mettre en doute l’indépendance du journal régional L’Est-Républicain, un journaliste, Pascal BAUDOIN a publié cet article le 13 juin :

"BURE : les risques analysés par un scientifique
Les ennuis, c’est maintenant"


Dans cet article Bertrand THUILLIER soulève tous les problèmes à court terme cités plus haut.

15 – Voilà Madame la Ministre l’essentiel de notre analyse et de notre questionnement.
Nous en appelons à votre arbitrage.


Nous craignons le pouvoir des lobbies.
Et quand on prend connaissance du curriculum de vos directeurs de cabinet on a lieu d’être inquiet :
- Pierre-Franck CHEVET, Corps des Mines et adjoint d’André-Claude LACOSTE pendant 9 années…
- Pierre CUNEO, qui au sein de l’institut ASPEN fait la promotion du nucléaire… et dont Fabrice NICOLINO vient de faire un portrait pas très flatteur.

16 – Merci d’aborder le problème de l’enfouissement lors de la prochaine Conférence environnementale.
Et nous espérons que les associations suivantes sauront nous représenter : Amis de la Terre - Ecologie sans Frontière - Ligue de Protection des Oiseaux - France Nature environnement - Fondation Nicolas Hulot – Greenpeace – WWF - Ligue ROC.

Enfin madame la Ministre vous venez de déclarer : « J’attends de cette conférence un moment de vérité. La confrontation franche des visions, des idées, est féconde. Elle va produire des résultats. …/... Nous nous engagerons sur une feuille de route, il n’y aura pas de sujets tabous. Laissons la discussion se faire. »

Nous comptons sur vous. Merci de consacrer quelques minutes à ce choix de l'enfouissement, et faîtes en un moment de vérité.

17 Madame la Ministre, vous avez reçu le 21 juillet dernier Bertrand PANCHER, député de la Meuse, et à en croire son compte-rendu dans la presse vous semblez préoccupée du ressenti de la population. Mais le député, lui, était venu vous parler de fiscalité, de retombées financières…

Nous pouvons vous communiquer quelques détails sur tous les « ressentis »…


Bien cordialement

Michel GUERITTE
Président de la Q.V.
8 route de Soulaines
10200 VILLE-SUR-TERRE

 

 

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28/03/24
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