Publié le 04/10/2013

 

 

Bure : les déchets enfouis seront-ils récupérables ?

 

La réversibilité constitue une question centrale du débat qui entoure le futur enfouissement des déchets nucléaires à Bure. Elle sera discutée mercredi sur internet. Avant de l’être à l’Assemblée nationale.

 

Pour l’Andra c’est une « question centrale du débat public, les échanges devant donner lieu à une future loi ». Pour les opposants, c’est un facteur de plus de rigolade… ou d’énervement, c’est selon. Le débat contradictoire sur Cigéo, le futur centre de stockage des déchets nucléaires en Meuse et Haute-Marne, portera mercredi sur la réversibilité (voir modalités ci-dessous).

Que se cache-t-il exactement derrière ce mot pompeux ? Même le Clis (Comité local d’information et de suivi) réfute le bien-fondé de ce terme : « Pour le grand public, la réversibilité est la possibilité d’aller retirer un colis pour tout motif et à tout moment, y compris après la fermeture du stockage. Si c’est bien ce sens qui est donné au mot réversibilité, il apparaît clairement que l’appellation stockage géologique réversible est abusive, car le concept est par définition définitif, pour des raisons de sûreté. » L’Andra ne s’en cache pas : « Le stockage profond des déchets radioactifs est une installation destinée à être fermée définitivement pour limiter les charges supportées par les générations futures. Il fera ensuite l’objet d’un suivi de sûreté passif. »

Reste à savoir quand le couvercle sera scellé ? La loi de 2006 table sur une réversibilité d’au moins 100 ans. Soit le temps nécessaire à l’exploitation du centre et à l’enfouissement de tous les colis. Un siècle, c’est une goutte d’eau à l’échelle du temps nucléaire et de déchets qui mettront des millions d’années à devenir inoffensifs.

 

Verrou psychologique

 

Ce qui pousse les opposants à dénoncer une énième manipulation : « Ce concept de réversibilité n’est qu’un hochet pour faire passer la faisabilité du centre et faciliter son acceptabilité sociale. Cela a permis de faire sauter un verrou psychologique chez beaucoup d’élus locaux », explique Michel Marie du Cedra. Car dans la réalité, les anti-Bure ne croient pas une seconde à cette possibilité. « Comment récupérer techniquement et financièrement ces colis ? Qui ira les chercher ? C’est un mensonge de plus à rajouter à la longue liste qu’on nous fait avaler depuis le début. Dans ce gruyère de 300 km de galeries, qui vont subir des pressions extraordinaires, imaginer qu’on pourra récupérer ces colis relève de la science-fiction », ajoute Michel Gueritte.

L’Andra, qui planche sur une fermeture progressive du centre, voit un intérêt majeur à cette réversibilité : « Cela permet de laisser aux générations futures le choix de modifier ou d’orienter le processus de stockage, de retirer les colis stockés et de les entreposer si un autre mode de gestion était envisagé. On ne peut pas préjuger que des solutions de traitement émergent dans le futur », rappelle Thibaut Labalette, directeur des programmes à l’Andra.

Le mot final reviendra aux parlementaires. Entre 2015 et la date d’autorisation de création d’un centre de stockage, l’Assemblée nationale doit promulguer une loi fixant les conditions de la réversibilité. Un calendrier que le Clis juge incohérent, l’Andra devant déposer la demande d’autorisation du centre après le débat public. « Il serait logique que celui-ci intervienne après l’adoption de la loi sur la réversibilité, pour éviter tout risque de contradiction entre les deux », regrette le Clis qui estime par ailleurs que « les délais laissés à la recherche par ce calendrier sont trop courts. »

Philippe MARQUE.

 

 

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